On ne prend pas une décision sous le coup de l’émotion, non… Pourtant, pas toujours facile d’aborder de manière détachée nos transitions professionnelles. Excitation mais aussi peur, stress, doutes… Que l’on soit en transition entre deux emplois ou en recherche d’un nouveau projet professionnel, on peut se sentir envahi par nos émotions en période de changement. C’est parfois comme si nos ressentis squattaient notre quotidien pour parasiter toutes nos réflexions. Faut-il pour autant les ignorer, les mettre de côté pour s’assurer de prendre les bonnes décisions ? Certainement pas.
Ces émotions nous donnent aussi des indications susceptibles de nous guider dans nos décisions, je le vois tous les jours dans ma pratique de coach. Si certaines émotions peuvent nous tétaniser, d’autres ont le pouvoir un peu magique de nous mettre en mouvement. Étymologiquement, l’émotion est justement “ce qui meut” ! Et si nous nous mettions volontairement à l’écoute de nos émotions pour mieux avancer en eaux troubles ?
Décision rationnelle VS. décision émotionnelle
Vous la voyez, cette peur irrépressible de démissionner ou d’accepter ce nouveau CDI ? Celle où vous avez l’impression de lâcher la proie pour l’ombre. « Est-ce vraiment la bonne décision à prendre ? Ne vais-je pas le regretter ? » C’est la tempête dans votre tête ! Alors, forcément, vous avez envie de faire taire ces petites voix qui vous empêchent d’être rationnel… Et c’est compréhensible, c’est parfois très désagréable de se sentir assujetti à ces états d’âme passagers lorsque l’on envisage un pivot de carrière… Car les émotions influencent nos perceptions, mais il est si difficile de faire sans les prendre en compte…
Si l’émotion est une réaction bio-physio-psychologique que nous envoie notre corps face à ce qui se passe dans notre environnement, elle est aussi une invitation à l’action. Sans émotion, pas de prise de décision ? C’est en tout cas ce qu’a démontré le chercheur en neurobiologie Antonio Damasio dans les années 90 (L’erreur de Descartes, A. Damasio). Les recherches menées par le spécialiste ont mis en avant l’implication de la zone cérébrale des émotions dans nos processus cognitifs. Celui qui serait coupé de ses émotions pourrait alors éprouver de grandes difficultés à poser des décisions !
C’est en fait comme si l’émotion nous permettait une plus grande rapidité et une meilleure efficacité de la pensée : face à la complexité des processus de décision qui demandent de prendre en compte de très nombreuses variables, l’appel à l’émotion fonctionne comme un raccourci qui nous permet rapidement d’écarter les propositions déplaisantes ou dangereuses, ou de favoriser celles qui sont associées à un souvenir positif. C’est grâce à lui que l’on peut ressentir le risque lié à un changement de poste, par exemple, mais aussi envisager l’inconfort qu’il y aurait à ne pas bouger. En faisant le lien avec nos souvenirs, les émotions nous permettent de sentir les choses de manière un peu instinctive. Cela peut parfois nous donner un sacré coup de pouce, mais je le reconnais, parfois aussi nous freiner à l’excès.
Vous l’avez compris, nos émotions ne sont pas que des signaux parasites. Pourtant, en fonction de nos éducations, de nos histoires individuelles ou de la culture dans laquelle nous avons baigné, nous avons tendance à nous en méfier pour prêter davantage attention à nos pensées. Et chez vous, qu’en est-il ? L’émotion, dangereux distracteur ou boussole dans vos choix de vie ?
Et si les émotions pouvaient nous aiguiller dans nos décisions ?
Les émotions, messagères de l’ombre
Nos émotions ont pour nous une fonction très précise : elles sont des indicateurs de nos états internes. Parce qu’elles font appel à une partie très spontanée, incontrôlable de nous, elles nous permettent de communiquer avec ce qu’il y a à l’intérieur. Lorsque l’on est à des tournants de sa vie professionnelle, que l’on ne se sent pas bien dans son job ou que l’on cherche quelles sont les meilleures options pour avancer, se connecter à nos émotions peut être très précieux ! Une partie de mon travail de coach consiste à permettre à cette petite voix que l’on a au fond de soi, de s’exprimer. Des personnes viennent me voir parce qu’elles veulent des conseils, des idées, de l’aide dans leurs démarches de transitions professionnelles. En réalité, le chemin que l’on parcourt ensemble n’est pas uniquement une exploration des routes à prendre, mais surtout une exploration de ce qui est au fond : besoins, désirs, aspirations, rêves. Dans ces moments-là, l’important est de faire la lumière, de se connecter avec ses ressentis, dépasser aussi ses peurs, identifier les interdits et les désirs. Quels sont les formatages et les craintes qui nous font choisir une option plutôt qu’une autre ? Qu’est-ce qui nous convient dans notre fonctionnement, et qu’est-ce qui nous enferme ?
Les émotions trahissent nos besoins
Les émotions peuvent aussi être une véritable porte d’accès à nos besoins fondamentaux. Les émotions négatives tout particulièrement - tristesse, colère, peur - nous renseignent sur nos besoins non satisfaits, elles sont comme un signal d’alarme (selon la CNV, Communication Non-Violente). Si vous vous trouvez dans une situation professionnelle préoccupante ou que vous vous apprêtez à prendre une décision qui vous met en danger par exemple, il est très probable que vous ressentiez dans votre corps un état physique et émotionnel déplaisant.
Rester à l’écoute de vos émotions ouvre des pistes de réflexion : vous vous sentez stressé dans votre travail actuel ? Vous avez peut-être besoin de repos, d’un espace de respiration ? Ou bien, vous avez peut-être besoin de davantage de liberté. Vous vous sentez en colère contre votre employeur, contre un membre de votre équipe ? Vous avez peut-être besoin de davantage de respect, mais aussi de confiance…
Intégrer davantage nos émotions dans nos prises de décisions… comment faire ?
Vous passez des entretiens dans une entreprise qui vous fait une offre, et vous ne savez pas quoi répondre. Parfois, à la croisée des chemins, deux options s’offrent à vous : accepter l’offre ou refuser. Aucune des propositions ne vous semble évidente, de part et d’autre se trouve du “pour” et du “contre’’. Pour le philosophe Charles Pépin, c’est précisément dans ce genre de situation où les critères rationnels ne nous permettent pas de choisir qu’une véritable décision doit être prise. On doit « compenser l’insuffisance des critères par l’usage de sa liberté » (cf : La confiance en soi, Charles Pépin). Le philosophe nous invite à rester connecté à notre désir, rester fidèle à nous-même pour trouver une sorte de cohérence intérieure.
Suite de l'article ici sur le site Welcome to the jungle:
Photo d’illustration by Welcome to the Jungle
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